Royale, la cour en perd la tete

Du Figaro

Hollande n y va pas par 4 chemin: le dialogue avec François Bayrou est fini. « Dès lors qu'il dit qu'il ne donnera pas de consigne de vote, nous allons nous adresser à ses électeurs, rien qu'à ses électeurs », a déclaré le premier secrétaire du PS au Figaro, depuis Nantes où il était en déplacement.

« La main a été tendue, elle n'a pas été prise. Il n'y a donc pas de négociation à avoir avec l'UDF et pas de majorité avec François Bayrou. Le seul débat que nous devons avoir entre les deux tours, c'est avec Nicolas Sarkozy », a-t-il ajouté. Avec cette déclaration, le numéro un du PS a voulu clore un débat ouvert le matin même lors du secrétariat national du PS. Plusieurs responsables étaient intervenus pour protester contre la nouvelle stratégie de la candidate en direction de l'UDF.

Pour eux, Royal a commis une « erreur d'analyse » en voulant faire « un coup ». Ils critiquent sa proposition d'envisager la nomination de ministres UDF. Puis son directeur de campagne François Rebsamen a laissé penser, hier sur RTL, que le PS était d'accord avec ce changement de ligne puisque... personne n'avait protesté. « Ce procédé est parfaitement déloyal », a tonné l'ancien ministre Jean ­Glavany. Personne n'avait été informé, s'agace-t-on au PS.

Si tous étaient tombés d'accord pour s'adresser aux électeurs de François Bayrou et mettre le président de l'UDF au pied du mur, il n'a jamais été question d'aller plus loin. C'est un « changement » de stratégie qui n'a pas été discuté, s'est alarmé Daniel Vaillant. D'autres se sont inquiétés pour l'identité du PS. Pour montrer le risque qu'il y aurait à « faire exister le centre », Harlem Désir a pris exemple sur les autres pays européens. Là où une telle force politique existe, le Parti socialiste local en a toujours fait les frais : « Cela a abouti à une machine à détruire les socialistes. » Avec une conséquence : « Une cassure. » La logique serait la même en France. Si l'alliance avec l'UDF devenait réalité, il y aurait un risque de scission, prévient-on au PS.

« Prendre un risque  »

Pour défendre Ségolène Royal, le premier fédéral du Nord Gilles Pargneaux et le sénateur David Assouline ont rappelé que les réserves de voix se trouvaient à l'UDF. Sans convaincre. Pour l'emporter, la candidate ne doit pas perdre de voix sur sa gauche, a prévenu l'un des intervenants : « On reçoit des mails d'électeurs qui nous disent que si c'est cela, ils ne voteront pas pour Royal. » C'est le porte-parole du PS Julien Dray qui a donné les clés de cette stratégie controversée : « Il fallait prendre un risque », a-t-il expliqué, pour envoyer un « signe » dans la bataille du second tour. Présent, François Rebsamen n'a pas pris la parole, à la surprise des autres participants.

Pour ne pas gêner Ségolène Royal dans l'entre-deux-tours, les socialistes auraient voulu ne pas médiatiser l'accrochage au secrétariat national. Malgré ce souci, quelques élus ont réagi publiquement dans la journée. « À l'issue d'une initiative que j'imagine avoir été soigneusement pesée dans ses conséquences, a déclaré, plein d'acidité, le député Michel Charzat, nous nous trouvons dans une situation cocasse où François Bayrou, le battu du premier tour, se trouve en position d'arbitre du second. Je m'inquiète de la confusion qui pourrait s'instaurer. » « Camarades, vous jouez avec le feu », s'est inquiété Jean-Luc Mélenchon. Le président du MJS Razzye Hammadi s'est dit amer : « Ça fait mal au coeur. »